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Management packages – Loi de Finances pour 2025

La Loi de finances pour 2025 introduit un régime fiscal spécifique applicable aux gains réalisés par les salariés et dirigeants sur les titres souscrits ou acquis en lien avec l’exercice de leurs fonctions au sein de leur entreprise ou d’une société du groupe (article 93).


Contexte

Cette réforme fait suite aux décisions du Conseil d’État du 13 juillet 2021 (CE, 13 juillet 2021, n° 435452, 428506 et 437498) qui ont eu pour effet de permettre dans certains cas à l’administration fiscale de requalifier dans la catégorie des traitements et salaires les gains résultant de plans d’investissement des dirigeants et salariés (« management packages ») souscrits par ces derniers à des conditions directement liées à leur activité professionnelle.

Ces décisions n’ayant pas levé les nombreuses incertitudes qui entourent le régime fiscal applicable aux managements packages compte-tenu de leur diversité, le législateur a souhaité clarifier les règles applicables aux situations dans lesquelles un salarié ou dirigeant est propriétaire d’actions ou de titres donnant accès au capital de son entreprise, ou d’une société du groupe auquel appartient son entreprise.

Régime fiscal

Inséré à l’article 163 bis H du CGI, le nouveau régime prévoit que :

  • Principe: Les gains nets réalisés par un salarié ou un dirigeant à raison de la cession de titres de son entreprise (ou d’une entreprise liée) sont imposés comme des salaires lorsque ces gains sont acquis en contrepartie des fonctions de salarié ou dirigeant (y compris les gains nets de cession des AGA, SO et BSPCE) (BOI-RSA-ES-20-60 n° 160).

Ce gain net s’entend du gain réalisé lors de la disposition, cession, conversion ou mise en location des titres (BOI-RSA-ES-20-60 n° 150). Tous les titres sont susceptibles d’être concernés (actions ordinaires, actions de préférences, obligations convertibles ou remboursables, bons de souscriptions etc.), y compris notamment ceux émis dans le cadre d’un régime spécifique qualifiant tels que les BSPCE, actions gratuites ou de préférence et les stock-options (BOI-RSA-ES-20-60 du 23-7-2025 n° 70).

L’existence d’une contrepartie peut être déterminée au regard notamment de l’atteinte de niveaux de performance ou de l’obligation faite au salarié ou au dirigeant de respecter certaines stipulations contractuelles.

L’administration estime notamment que l’existence d’une contrepartie est établie lorsque le salarié ou le dirigeant (BOI-RSA-ES-20-60 du 23-7-2025 n° 200) :

  • bénéficie de tout type de mécanisme lui permettant de percevoir, lors de la cession ou de la disposition de ses titres, sous réserve de l’atteinte de critères de performance, un gain distinct de celui auquel sa part dans le capital devrait lui donner droit (à titre d’illustration, cas des ADP dites « ratchet ») ;
  • détient des actions (ordinaires ou de préférence) acquises dans le cadre d’une opération dite de « sweet equity » qui lui permet de détenir une quote-part du capital de la société émettrice des titres plus importante que celle à laquelle il aurait pu prétendre, pour un investissement équivalent, si les autres actionnaires avaient également investi exclusivement dans des titres de capital.
  • Exception: Une fraction des gains (à l’exclusion des avantages résultant de l’acquisition ou de la souscription des titres) peut être imposée comme les plus-values de cession de valeurs mobilières, dans une certaine limite. Cette limite est déterminée par un multiple de la performance financière de la société, fixé à trois fois le ratio entre la valeur réelle (retraitée des dettes contractées à l’égard des associés directs ou indirects) de la société émettrice à la date de cession et sa valeur réelle à la date d’acquisition ou de souscription.

L’imposition du gain comme plus-value mobilière (flat tax) dans cette limite est toutefois subordonnée au respect des deux conditions suivantes :

  • Les titres cédés doivent présenter un risque en capital ;
  • Les titres cédés doivent avoir été détenus pendant au moins deux ans (sauf AGA, SO et BSPCE).

Ce nouveau régime s’applique aux dispositions, cessions, conversions ou mises en location de titres réalisées depuis le 15 février 2025 (lendemain de la promulgation de la Loi de finances). L’administration fiscale précise expressément que le gain net retiré d’une telle opération réalisée avant le 15 février 2025 n’est pas concerné par ce régime spécifique d’imposition (BOI-RSA-ES-20-60 n° 20). Tel est notamment le cas des gains placés en sursis d’imposition sur le fondement de l’article 150-0 B du CGI avant le 15 février 2025.

Les titres relevant de ce nouveau régime fiscal ne peuvent pas être souscrits ou inscrits dans un PEA.

Régime social

La Loi de finances pour 2025 a également introduit à l’article L. 137-42 du Code de la sécurité sociale une nouvelle contribution salariale spécifique de 10% assise sur la fraction du gain taxée comme un salaire.

Cette contribution est recouvrée, comme les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, par voie de rôle et son fait générateur est identique à celui de l’impôt sur le revenu. L’intégralité du gain net, quel que soit son régime d’imposition, est exclue de l’assiette des cotisations sociales.

Ces nouvelles dispositions s’appliquent aux dispositions, cessions, conversions ou mises en location de titres réalisées entre le 15 février 2025 (lendemain de la promulgation de la Loi de finances) et le 31 décembre 2027.

Notre analyse

Si ce nouveau régime est appelé à générer une complexité complémentaire, il s’avère positif à bien des égards :

  • Ce régime a vocation uniquement à s’appliquer aux gains réalisés par les salariés et les dirigeants es qualité. Si le dirigeant ou le salarié investit et cède dans les mêmes conditions que les autres investisseurs, le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières s’appliquera.
  • Les dirigeants et salariés pourront désormais voir une partie significative de leurs gains bénéficier du régime des plus-values de cession de valeurs mobilières des particuliers (flat tax au taux de 30%).
  • Le gain net de cession des BSPCE, SO et actions gratuites d’actions (ainsi d’ailleurs que le régime fiscal du gain d’acquisition) n’en sera pas modifié. En revanche, ce gain net de cession pourra être soumis au nouveau régime à chaque fois que le prix de cession déguisera un avantage salarial (prix de cession différencié, garantie sur le prix de cession etc.). A ce titre, selon nous, ce nouveau régime fait en particulier perdre aux AGA de préférence et « ratchet » de leur intérêt (étant précisé que ce système d’intéressement faisait peser un risque de remise en cause sur le fondement de l’abus de droit).

Toutefois, nul doute que ce texte génèrera des contestations ne serait-ce que sur le sujet complexe des valeurs à retenir pour déterminer la partie du gain net de cession relevant du régime des plus-values et sera probablement difficile d’application pour l’administration fiscale. Compte tenu de son fait générateur, il nécessite de faire un audit de tous les dispositifs de management package en cours.


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